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Comment aider un enfant perfectionniste

Par Elizabeth WESTRUPP - Gabriella KING - Jade SHEEN - | Edition N°:6801 Le 08/07/2024
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Elizabeth Westrupp est professeure associée en psychologie, Université Deakin

Gabriella King est chercheuse associée, Université Deakin

Jade Sheen est professeure associéeen psychologie, Université Deakin

Dès le plus jeune âge, certains enfants peuvent manifester des signes de perfectionnisme. Tout petits, ils peuvent déchirer leur dessin s’ils ne le jugent pas tout à fait correct. Plus tard, ils peuvent éviter de faire leurs devoirs, ou refuser complètement de les faire, par peur de l’erreur. Le perfectionnisme peut les conduire à se sentir dépassés, en colère et frustrés, ou tristes et repliés sur eux-mêmes. Pourtant, dans nos sociétés, ce trait de caractère n’est pas considéré comme une mauvaise chose. Le fait d’être qualifié de «perfectionniste» passe d’ailleurs souvent pour un compliment, désignant un étudiant d’excellent niveau et travailleur, ou toute personne qui essaie de faire de son mieux et s’assure que le travail est bien fait.

Ces points de vue apparemment opposés reflètent la nature complexe du perfectionnisme. Le perfectionnisme: un trait de caractère à double tranchant. Les chercheurs considèrent en général le perfectionnisme sous deux angles:

- les aspirations perfectionnistes: être déterminé à atteindre des objectifs et à réaliser de grandes choses

- les préoccupations perfectionnistes: l’inquiétude quant à la capacité de répondre à des normes élevées, accompagnée d’autocritique sur les performances.

Si des aspirations perfectionnistes peuvent être positives et conduire à des résultats élevés, les préoccupations perfectionnistes peuvent accroître le risque que les enfants développent des troubles alimentaires, de l’anxiété ou de la dépression, et qu’ils obtiennent des résultats scolaires inférieurs. Les enfants et les adolescents peuvent faire l’expérience du perfectionnisme dans des domaines divers, qu’il s’agisse du travail scolaire, du sport, de performances artistiques ou musicales, ou en ce qui concerne leur apparence.

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Le perfectionnisme peut se manifester chez les enfants et les adolescents par les signes suivants:

- une attitude très critique envers eux-mêmes;

- des réactions aux erreurs qui semblent être exagérées;

- une préoccupation et une inquiétude intenses concernant leurs normes et leurs objectifs et/ou une procrastination;

- un changement significatif dans les performances, par exemple, des résultats scolaires plus faibles;

- une irritabilité et des émotions négatives, du stress et des sentiments de dévalorisation;

- des problèmes de sociabilité avec les pairs et les amis, allant du harcèlement à une mise à l’écart volontaire.

Une série de facteurs génétiques, biologiques et environnementaux influencent le perfectionnisme chez les enfants. En tant que parent, notre rôle est important. Si les résultats des recherches suggèrent que nous ne pouvons pas réussir à augmenter les aspirations perfectionnistes qui sont positives, une éducation sévère ou contrôlante peut augmenter les préoccupations perfectionnistes négatives. Les parents qui sont eux-mêmes perfectionnistes peuvent aussi induire ce type d’attitude chez leurs enfants. Alors, comment trouver le juste milieu entre soutenir les intérêts de notre enfant et l’aider à réaliser son potentiel, sans lui mettre la pression et augmenter le risque de conséquences négatives?

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Apprendre à se fixer des objectifs réalistes

Une excellente métaphore est celle du jardinier contre celle du charpentier décrite par la professeure de psychologie Alison Gopnik. Au lieu d’essayer de façonner leurs enfants en les contrôlant et en contrôlant leur environnement (comme un charpentier), les parents peuvent adopter l’esprit du jardinier, en leur offrant beaucoup d’espace pour qu’ils grandissent dans leur propre direction, et en les nourrissant d’amour, de respect et de confiance. Nous ne pouvons pas contrôler ce qu’ils deviennent, il est donc préférable de prendre du recul, de profiter de cette aventure commune et de se réjouir de découvrir la personne qu’ils deviennent.

Cependant, il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire en tant que parents pour aider nos enfants s’ils manifestent des signes de perfectionnisme. Nous pouvons leur montrer comment se fixer des objectifs réalistes et faire preuve de souplesse lorsque les choses évoluent ou tournent mal, les aider à gérer le stress et les émotions négatives, et créer un équilibre sain et une routine au quotidien.

                                                

Montrer l’exemple

Les personnes ayant des tendances perfectionnistes se fixent souvent des objectifs impossibles à atteindre. Nous pouvons les aider à développer plus de flexibilité et à se fixer des objectifs plus réalistes en leur posant des questions comme: «Que devrais-tu faire pour te rapprocher un peu plus de cet objectif?» Il est également utile d’identifier le minium et le maximum qu’on peut atteindre. Si votre enfant tient à décrocher une note élevée à l’école, par exemple, fixez-la comme «maximum à atteindre», puis aidez-le à identifier un «score minimum» qu’il jugerait acceptable, même s’il n’est pas satisfait du résultat.

Cette stratégie peut demander du temps et de la pratique mais elle peut aider l’élève à élargir peu à peu la palette de résultats qu’il est prêt à accepter et créer de la flexibilité. Si un objectif est basé sur la performance et que le résultat ne peut être garanti (dans le cas par exemple d’une compétition sportive), encouragez votre enfant à se fixer un objectif personnel sur lequel il a plus de contrôle. Nous pouvons également aborder la question du perfectionnisme dès le plus jeune âge et expliquer que tout le monde fait des erreurs. En fait, il est bon de montrer l’exemple à nos enfants en parlant de nos propres erreurs et sentiments, pour leur montrer que nous-mêmes ne sommes pas parfaits.

Certaines réactions à haute voix peuvent aider les enfants à voir que nous «joignons le geste à la parole». Par exemple, si vous brûlez le dîner, vous pouvez exprimer ceci: «Je suis déçu(e) parce que j’y ai consacré du temps et des efforts et que les résultats n’ont pas été à la hauteur de mes espérances. Mais nous commettons tous des erreurs. Je ne fais pas les choses correctement à chaque fois.»

                                                

Nommer les émotions

Certains enfants et adolescents ont une tendance naturelle au perfectionnisme. Plutôt que d’essayer de contrôler leur comportement, nous pouvons leur apporter un soutien affectueux. Lorsque notre enfant ou notre adolescent est frustré, en colère, triste ou accablé, nous pouvons l’aider à nommer, exprimer et valider toutes ses émotions. Les parents peuvent craindre que le fait de reconnaître les émotions négatives de leur enfant ne les aggrave, mais c’est le contraire qui est vrai.

Les éléments constitutifs d’un développement sain de l’enfant sont des relations familiales fortes et affectueuses, une bonne alimentation, des jeux créatifs et beaucoup d’activité physique, de sommeil et de repos. Le perfectionnisme est associé à de la rigidité et à l’idée qu’il n’existe qu’une seule façon de réussir. Nous pouvons au contraire encourager la flexibilité et la créativité chez les enfants.

Le cerveau des enfants se développe par le jeu. De nombreuses recherches montrent que le jeu créatif et dirigé par l’enfant est associé à une meilleure régulation des émotions et à une série de compétences cognitives, notamment la résolution de problèmes, la mémoire, la planification, la flexibilité et la prise de décision. Le jeu n’est pas non plus réservé aux jeunes enfants – il est prouvé que le jeu exploratoire et créatif, quel qu’il soit, est également bénéfique aux adolescents et aux adultes. Il est également prouvé que le fait d’aller dans la nature et de bouger peut favoriser les capacités d’adaptation, la régulation des émotions et le développement cognitif des enfants.

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation

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